3 Décembre 2015
Une page se tourne dans nos articles, je pense sincèrement que nous sommes tous un peu arrivé à maturation dans notre jugement vis à vis du poisson. En fait nous avons pris conscience que le poisson est avant tout un être vivant et il doit être respecté impérativement comme tel. Nous en avons fini avec les rêves de pêches où seul le nombre de grosses prises fait office, un jour, nous sommes tombés au fond des yeux de nos poissons. Mais où tout cela va nous conduire ?
Moi ce qui m'a conduit à avoir de tels sentiments c'est tout ce qui tourne autour de la pêche. Aujourd'hui bien peu de pêcheurs sont animés par la réelle passion de la mer. la quasi totalité des pratiquants se fient à une bonne pub qui vantent les mérites d'un produit ou éventuellement à des résultats largement publicités. On en oublie l'essentiel c'est à dire, la simplicité, les saisons, le respect et la discrétion. La traque de ces êtres sublimes est un éléments essentiels qui ne doit pas être pris à la légère car la survie des espèces compose à cent pour cent toute notre vie de passionnés. Mais je ne voit dans les images des réseaux sociaux que bien peu de pêcheurs qui montrent le désir de rester bien au contrôle de leurs prises. La place d'un pêcheur amateur n'est pas sans incidence sur les fonds car conjugué à des centaines d'autres toute l'importance de ne prélever que ce qu'on peut prendre prends son sens. C'est toujours ce que je craint quand j'arrive à la pêche, il m'arrive parfois de faire mon gros poisson d'entrée de jeu. Je ne prévoit pas de ne rester que quelques heures sur un poste et bien souvent quand le poisson est au rendez-vous mes articles tournent court. Moi ce que j'aime c'est exercer ma patience, mon attention, mes connaissances, même si elles sont largement mises à mal tout au long de l'année, ben, c'est mon grand plaisir. C'est le plaisir de ne revenir qu'avec quelques prises que je vais cuisiner avec tout le respect d'une petite vie qui s'est trompée se sens, le bonheur de le faire partager à ma famille qui n'est laissera que quelques miettes au coin de l'assiette. Bien sûr, si je capture un poisson record mon plaisir sera encore plus grand, mais que ferais-je de dix daurades de cinq kilos et même deux ? Personnellement, je préfère y revenir la semaine suivante et de retenter l'impossible.
Vous vous souvenez, le mois dernier une truc de dingue m'est arrivé, vous en avez été les témoins. A peine arrivé sur mon poste je balance un peu au hasard une ligne armée d'un tout petit bout de ver de Rimini surgelé et en l'affaire d'une poignée de secondes rentre dans une autre dimension. En fait un daurade de plus de quatre kilos à capté ce tout petit bout de ver à la descente et m'a fait une touche ultra merdique. En l'affaire de cinq minutes j'avais un placard dans les mailles de mon salabre, que faire ? A quoi bon en prendre une autre ? Pourquoi faire ? J'ai fumé ma clope nerveusement en la regardant mourir dans une flaque d'eau farcie de crevettes avec un sentiment franchement mitigé, j'ai bu quelques gorgées de bière et je suis rentré chez moi...Même si l'étreinte des calanques n'a duré que quelques minutes elles ont rempli un gros réservoir.
A vrai dire je ne souhaite pas que ce scénario se déroule souvent car je ne pêche pas dans une marre aux canards comme à la kermesse de l'école maternelle. Tout le plaisir d'une capture réside dans une sorte de conjugaison qui n'abouti que lorsque le pêcheur à tout tenté pour comprendre le fond de l'eau. Ca marche parfois, ça ne marche pas toujours... Quand je veut faire de nombreuses capture je vais faire la roche de jour, ma conscience est tranquille car tout sera intimement utilisé jusqu'à la dernière essence du moindre poisson de roche.
Mais tant que le pêcheur ne sera pas en paix avec la peur du bredouille ou à l'inverse de partir de son poste avec la conviction que quelques poisson vont largement suffire pour se sentir repus, il restera du chemin à faire. Un chemin encombré de beaucoup de publicités qui font croire en un truc qui n'existe pas, une route virtuelle qui n'a d'autre but que de vendre du matos à de jeunes et inexpérimentés pêcheurs quelque soit leur âge...
Pour le pêche de ce soir tout reste à faire. Le temps est franchement merdique et je ne voit pas comment la moindre capture viendra orner une soirée qui s'annonce bien mal. Je gare ma voiture sur le bord de la route qui mène vers les Goudes et sans plus attendre je lance mes lignes vers la mer. D'entrée de jeu le bouchon mis au calmar coule sous les eaux sans aucune retenue. J'ai l'habitude de ce scénario, tout en douceur je remonte la ligne et je sent une certaine lourdeur sur le fil qui trahi la présence d'un calmar. A ce moment tout prends une importance primordiale dans la remontée, vu qu'il ne tire pas comme un forcené je sait qu'il n'est pas piqué sur les hameçons et il me faudra le piéger au bord, tout en finesse, comme si c'était naturel. Les tours de manivelles sont lents et tout en souplesse, les relâchés sont nombreux jusqu'au moment où, il est sous mes pieds. Voilà un exercice complexe avec un moulinet qui range un mètre et des brouettes à chaque tours de manivelle, c'est toute la complexité de la pêche, la technique avance mais...faut s'adapter. Il ne faut pas éclairer pour ne pas l'effrayer, tout se joue sur le toucher, il faut presque fermer les yeux et sentir du bout des doigts que sa prise se croie le plus fort. Toujours avec une extrême finesse le calmar est sorti de l'eau sans aucun crachotis, c'est la preuve qu'il n'a rien vu venir.
J'ai même peine à y croire tellement c'est incroyable de prendre un calmar quand l'eau frise les 15°. Nous sommes encore une fois dans une saison qui n'est pas propice à cette espèce vu la douceur insupportable. Bon, on verra bien si d'ici quelques jours le froid viendra enfin refroidir les eaux, nous le savons bien, c'est une priorité pour eux.
Pourtant même si j'aime bien ça, cette douceur n'arrange pas mes affaires de ce soir. Malgré que je ne suis pas venu faire un carton et me montrer comme un gros naze sur facebook au bras d'un montagne de calmars, j'aimerais bien en prendre un peu plus juste pour bouffer demain. Mais la réalité sous marine va me rattraper et me donner gentiment la fessée. Mis à part un sar qui à gobé un gros bout de calmar surgelé, je n'aurai plus de touches. C'est là le lot de tout pêcheurs qui ne vit qu'au rythme des saisons, c'est le sens de la vie qui ne peut se combattre. C'est la vie d'un groupe de gars qui ne sont pas toujours d'accord avec la direction que prends la pêche moderne.